Le tribunal pourrait éviter la faillite de Bit4You

Le tribunal de l’entreprise de Bruxelles a examiné ce vendredi matin la solution proposée par les avocats de 400 clients lésés. Au terme d’une longue audience, la justice pourrait finalement ne pas imposer aux 11.000 déposants de Bit4You une longue procédure de liquidation et distribution des actifs. La décision est attendue dans la semaine.

Le tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles n’a pas tranché ce vendredi. Le rendez-vous matinal en chambre du conseil avait été avancé pour examiner la requête des avocats des clients lésés de la plateforme crypto belge, solution censée « éviter la faillite, synonyme de blocages pour une longue période ».

Au terme d’une longue audience qui a soulevé d’importantes questions juridiques, il nous revient que les administrateurs provisoires et le parquet se montreraient favorables à l’idée d’écarter la piste de la faillite et soutiendraient la demande de Mes Modrikamen et Ernotte.

La décision du tribunal est attendue dans la semaine mais pourrait donc vraisemblablement déboucher sur la désignation d’un praticien de la réorganisation en vue de mettre en œuvre l’accord du 17 janvier visant un rapide remboursement et de l’étendre au plus grand nombre de déposants de Bit4You, le dernier décompte officiel chiffrant 11.000 comptes clients individuels.

Les parties prenantes de l’affaire Bit4You sont embarquées dans un dernier sprint contre la montre depuis que le tribunal de l’entreprise a posé un ultimatum de 21 jours avec la faillite en ligne de mire. Or, la procédure de faillite constitue une course d’obstacles. Et ce ne sont pas seulement les avocats des quelque 400 clients lésés qui le prétendent.

Le mandataire de justice qui était préalablement chargé par le tribunal de vendre Bit4You, l’avocat Roman Aydogdu, avait analysé le statut juridique des cryptomonnaies, spécialement dans l’hypothèse d’une faillite ou liquidation judiciaire. Mais il avait dû se rendre à l’évidence qu’il ne parvenait pas à offrir « une sécurité juridique élémentaire et indispensable » pour définir, par exemple, la propriété dans le chef de Bit4You ou des clients.

Le danger de s’égarer dans une labyrinthique procédure de faillite

La procédure d’insolvabilité de Bit4You risque d’avoir un impact sur l’identité des clients auxquels l’exchange est légalement en droit de restituer leurs actifs numériques, ainsi que les modalités de restitution, notamment en termes de délais. Autrement dit, une incertitude juridique sur la titularité des cryptos qui exacerbe le risque de contestations et, donc, de complications.

À cette incertitude juridique liée à la nature des cryptos s’ajoute une incertitude judiciaire découlant de la faillite. La procédure de faillite offre effectivement un cadre judiciaire plus efficace qu’une réorganisation, « parce que le Code de droit économique limite dans le temps les revendications et permet de centraliser les contestations devant le tribunal de l’insolvabilité », avait motivé Me Aydogdu dans sa requête présentant les candidats repreneurs.

Malgré cela, la médaille a un revers : la faillite a pour conséquence d’affecter les clients d’une forclusion. Ce qui veut dire qu’ils perdront la faculté d’exercer un droit par suite de l’expiration d’un délai. Vulgarisation simultanée: toutes les démarches prendront du temps et le temps écoulé fragilisera la protection des intérêts des préjudiciés. En plus, la liquidation n’offre aucune marge légale pour les contestations. Alors que le statut des cryptos s’annonce déjà contestable.

Difficulté supplémentaire, la procédure annonce une longue série d’étapes. La déclaration de faillite de Bit4You sera prononcée par un jugement du tribunal. Entrera alors en jeu un curateur, un nouveau mandataire judiciaire, qui n’œuvrera plus au maintien de la société mais bien de la liquidation des actifs. Or, après de plausibles contestations, le curateur devra procéder à des restitutions de cryptomonnaies qui exigeront de lui certainement de jongler avec différentes plateformes, un travail avec diligence qui demandera du temps et engagera des coûts opérationnels élevés.

Ou alors, se dresse cette voie alternative du praticien et de l’accord, prétendument plus judicieuse car plus directe, plus rapide, (plus rémunératrice) et moins contestable. Le tribunal choisira-t-il de faire simple ou compliqué ?