Faillite de Bit4You : le tribunal se penche sur la solution de secours

Le tribunal de l’entreprise de Bruxelles examinera ce vendredi la requête des avocats des clients lésés de la plateforme crypto belge. Une demande qui, si la justice y accède, permettrait « d’éviter la faillite, synonyme de blocages pour une longue période », soutiennent les requérants.

Vers une fin heureuse de la saga Bit4You ? Une semaine s’est déjà écoulée depuis que le tribunal de l’entreprise francophone de Bruxelles a posé son ultimatum : citer l’exchange en faillite ou trouver une solution. Défendant les droits de quelque 400 clients dont les cryptos sont coincées sur la plateforme, les avocats Mischaël Modrikamen et Florian Ernotte ont alors réagi.

Ils ont introduit lundi une requête en désignation d’un praticien de la réorganisation. Il s’agit, comme son nom le laisse penser, d’un mandataire de justice qui a pour mission d’assister le débiteur ou les créanciers dans la négociation d’un plan de secours.

Car les avocats exhortent le tribunal à reconnaître « qu’une faillite de Bit4You est la plus mauvaise des solutions. Cette issue entraînera l’immobilisation pour de longues années de leur épargne en raison des contestations diverses qui seront soulevées dans le cadre de cette faillite. »

Toujours soumises aux aléas du marché, les cryptomonnaies bloquées sur la plateforme seront exposées à un risque de dépréciation supplémentaire. « À défaut de gestion pro-active, qu’un curateur ne peut et ne pourra réaliser », insistent les requérants.

La meilleure des solutions ?

Or, une alternative à la faillite a été trouvée depuis trois semaines. Les anciens administrateurs et l’actionnaire majoritaire de Bit4You ont conclu avec les représentants des clients un accord préalable le 17 janvier afin de dégager les bases d’une solution qui, d’avis de signataires, satisferait l’ensemble des déposants. Une entente qui pourrait déboucher sur un remboursement des déposants « à relativement brève échéance ».

Il ressort de la requête des avocats que, au cours du marché à la date de rédaction, environ 19,5 millions d’euros de dépôts de clients composent le passif de Bit4You. Et qu’un paiement de l’ordre de 55% pourrait être effectué immédiatement aux déposants et créanciers sur base des « cryptomonnaies “disponibles” ».

La plateforme crypto belge devrait encore récupérer 2,5 millions d’euros (sur une créance de 6,5 millions) auprès de son fournisseur estonien failli CoinLoan, entre 50.000 et 100.000 euros auprès de la plateforme américaine faillie elle aussi FTX (sur 200.000 euros) et encore 130.000 € auprès du market maker britannique B2C2.

« Ceci entraînerait une récupération supplémentaire pour les créanciers d’environ 15%. Pour le solde encore dû aux déposants, il serait notamment récupéré dans le cadre d’actions en responsabilité contre le réviseur de Bit4You et son assureur responsabilité », précisent Me Modrikamen et Me Ernotte.

« Intérêt collectif et respect de l’ordre économique »

Sans présupposer l’attitude qu’adoptera le président du tribunal, notons que les avocats des clients de Bit4You invoquent en droit qu’un praticien de la réorganisation peut bien être désigné pour faciliter la conclusion d’un accord amiable ou établir un plan de réorganisation et que cette demande est accordée si l’insolvabilité du débiteur est probable. Sous-entendu qu’accéder à une telle demande est dans l’intérêt collectif des créanciers.

Les avocats ajoutent que les termes généraux de l’accord conclu avec les fondateurs de Bit4You « respectent parfaitement l’égalité de traitement des créanciers, permettent un payement rapide des déposants qui retrouvent ainsi l’accès à leur épargne et permettent d’éviter la faillite, synonyme de délais et blocages pour une longue période ».

Enfin, compte tenu des difficultés déjà rencontrées par les mandataires de justice désignés par le tribunal, Me Modrikamen et Me Ernotte motivent que la voie du praticien de la réorganisation apparaît comme la plus judicieuse. La procédure devrait, selon eux, offrir « de meilleurs résultats au regard des nouveaux outils mis à sa disposition par la nouvelle loi ». À cet égard, les requérants ont proposé au président du tribunal de l’entreprise de désigner en qualité dudit praticien Me Michel Forges, l’ancien bâtonnier de Bruxelles (2018-2020).

Reste à découvrir si le tribunal de l’entreprise de Bruxelles se prononcera en faveur de cette solution de secours. Ou s’il lui préférera la procédure de faillite. Cela confirmera alors ces rumeurs de marché selon lesquelles d’aucuns souhaiteraient qu’on « ne sauve pas le soldat Bit4You », histoire que cela serve d’épouvantail.